Michel HUET en collaboration avec Baptiste Proutheau

URBANISME 

N.B. : pour un complément d’analyse de brèves du Droit de l’urbanisme, rejoignez cadredeville.com et consultez l’onglet « pratique juridique ».

Question ministérielle : les études réalisées en vue de l’adoption de la charte de parc naturel régional peuvent-elles être réutilisées dans le cadre de la procédure d’élaboration du SCOT ? 

La loi ALUR a créé la possibilité, pour une charte de parc naturel régional, de tenir lieu de SCOT pour les communes de ce PNR qui ne sont pas comprises dans le périmètre d’un SCOT. La condition pour cela est que la charte de PNR contienne, au sein d’un chapitre individualisé, les documents constitutifs du SCOT, avec une procédure d’élaboration identique à celle du SCOT.

Cette mesure est pragmatique et permet d’aider les communes n’ayant que peu de moyens à être couvertes par un SCOT. Il s’agit également d’éviter une superposition excessive de différents documents ayant un contenu substantiel globalement identique.

Source : réponse ministérielle à A. Genevard, JO AN, 24 juin 2014, page 5231, n°17278 

Questions pratiques sur le nouveau PUP 

Depuis la loi Alur, le projet urbain partenarial (PUP) a subi plusieurs modifications qui ne sont pas sans soulever de questions.

Tout d’abord la question se pose de savoir si la délivrance d’un permis de construire peut être conditionnée au PUP . Cette question est liée à la rédaction de l’article R.431-23-2 du Code de l’urbanisme qui énonce que lorsqu’une construction est située dans le périmètre d’un PUP, alors le permis de construire doit contenir « un extrait de la convention précisant le lieu du projet urbain partenarial et la durée d’exonération de la taxe d’aménagement ». En principe la convention PUP doit être signée avant l’autorisation d’urbanisme, en effet autrement il y aura application de la taxe d’aménagement, ou bien il y aura des difficultés pour prouver la nécessité des équipements en cause, qui s’avèrent être la raison d’être du PUP.
Finalement, si le projet faisant l’objet du permis de construire est situé dans une zone PUP et que la convention PUP a été signée, alors l’extrait devra être annexé à la demande de permis de construire, à défaut le dossier sera incomplet.

La répartition des financements en cas de PUP successifs pose également certaines interrogations. La collectivité fixe la répartition des financements sur la base d’un projet d’ensemble, global, prenant en compte les potentialités du terrain concerné. Par conséquent la clé de répartition du financement doit être fixée dès le départ. Néanmoins, le fait de fixer dès le départ la clé de répartition nécessite une sérieuse capacité d’anticipation, cela passe certes par des études de terrain, mais également par le fait de connaitre l’intention des propriétaires de terrains dans la zone PUP, d’où un aléa pratique conséquent.

Enfin, une question importante fait encore débat : existe-t-il une obligation de signer le PUP pour les constructeurs et aménageurs situés dans la zone PUP ? 

Qualification d’une promesse de bail à construction sur un terrain appartenant à un établissement public hospitalier 

Le Tribunal des conflits a estimé dans un arrêt du 7 juin 2014, Mutuelle EOVI USMAR services et soins c/ Centre hospitalier de Roanne, n° C3958, que le juge judiciaire était compétent pour connaitre d’une demande en paiement formée par une mutuelle, personne de droit privé, contre un établissement public de santé relative à l’exécution d’une promesse synallagmatique de bail à construction portant sur des parcelles ayant fait l’objet d’une décision de désaffectation et de déclassement du domaine public.

Source : revue Contrats Publics n°146, de septembre 2014, p.13, Qualification d’une promesse de bail à construction sur un terrain appartenant à un établissement public hospitalier 

Question ministérielle : les travaux de réfection d’une vitrine comportant le changement d’enseigne et du code couleur sont-ils soumis à déclaration préalable ? 

L’article R. 421-13 du Code de l’urbanisme énonce que les travaux réalisés sur des constructions déjà existantes sont en principe dispensés d’autorisation d’urbanisme. Cet article énonce néanmoins plusieurs exceptions, notamment les cas prévus à l’article R. 421-17 du même Code, par exemple « les travaux ayant pour effet de modifier l’aspect extérieur d’un bâtiment existant, à l’exception des travaux de ravalement ».

Il s’avère en l’occurrence que les travaux de réfection d’une vitrine, incluant un changement d’enseigne et du code couleur font partie de ces travaux ayant pour effet de modifier l’aspect extérieur d’un bâtiment existant. Par conséquent, la réponse à la question ministérielle est que ces travaux nécessitent une déclaration préalable.

Une précision s’impose néanmoins dans le cas où l’immeuble concerné par de tels travaux serait protégé par un PSMV ou bien s’il était classé en tant que monument historique, alors dans de tels cas, ces travaux de réfection nécessiteraient une demande de permis de construire.

Source : question ministérielle de Marie-Jo Zimmermann, JO AN, 17 juin 2014, page 5027, n°43194 

Les dispositions relatives à l’appréciation de l’intérêt pour agir sont applicables aux seuls recours formés contre des décisions intervenues après leur entrée en vigueur 

Dans un arrêt n°376113 en date du 18 juin 2014, le Conseil d’Etat a estimé que les dispositions de l’article L.600-1-2 du Code de l’urbanisme et de l’article L.600-1-3 du même Code ne sont applicables qu’aux recours contre les décisions intervenues postérieurement à leur entrée en vigueur.

Pour mémoire, l’article L.600-1-2 subordonne la reconnaissance d’un intérêt à agir contre certaines autorisations d’urbanisme au profit d’une personne autre que l’Etat, les collectivités ou leurs groupements, ou une association à la condition que le projet affecte directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien de cette personne.
Quant à l’article L.600-1-3, il impose d’apprécier l’intérêt pour agir contre une telle autorisation à la date d’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire.

La solution du CE est justifiée dans la mesure où ces articles affectent la substance du droit de former un recours pour excès de pouvoir contre une décision administrative.

Source : La Gazette des communes, des départements et des régions, n°32/2234, 1 septembre 2014, page 45 

Question ministérielle : le juge peut-il prononcer l’annulation partielle d’un PLU pour une erreur de délimitation des zones ? 

Le juge peut effectivement prononcer l’annulation partielle d’un PLU pour une erreur de délimitation des zones, en effet la loi ALUR a confirmé la divisibilité contentieuse des divisions d’urbanisme. Ainsi, le nouvel article L. 600-9 du Code de l’urbanisme prévoit que si l’illégalité n’affecte pas le programme d’orientations et d’actions du PLU, alors les dispositions des orientations d’aménagement et de programmation relatives à l’habitat ou aux transports et déplacements ou, enfin, les plans de secteur du document, le juge peut limiter l’annulation à l’élément concerné.

Il faut relever l’emploi de « notamment » dans l’article R. 600-9 du Code de l’urbanisme, ce qui laisse ouverte la possibilité pour le juge de prononcer une annulation partielle dans d’autres hypothèses. Enfin, ce mécanisme d’annulation partielle est utilisable dans toutes les dispositions divisibles des autres documents d’urbanisme ou de planification, comme les SCOT par exemple.

Est-il possible de retirer un permis d’aménagement illégal huit mois après sa délivrance ? 

• Question écrite n°12225 de M. J.-L. Masson, sénateur, à la Ministre du Logement et de l’Egalité des territoires 

En substance, la question posée par le sénateur était de savoir si l’article L. 424-5 du Code de l’urbanisme permet à un maire de retirer un permis d’aménager, « objet d’un recours contentieux en annulation, huit mois après qu’il ait été délivré et au motif que le recours mettrait en évidence le caractère illégal de cette autorisation d’urbanisme » ?

Après avoir rappelé le principe substantiel de l’article L. 424-5, la Ministre répond négativement à la question posée par le sénateur. En effet, bien que le critère d’illégalité soit rempli, le délai de trois mois est clairement dépassé.

Source : http://www.senat.fr/questions/base/2014/qSEQ140612225.html 

Léger assouplissement de la règle de notification d’un recours en matière d’urbanisme 

• Conseil d’Etat, 24 septembre 2014, n°351689 

Le Conseil d’Etat a rendu un arrêt en date du 24 septembre 2014 dans lequel il est venu préciser une des modalités de la notification d’un recours en matière d’urbanisme. En substance, la haute juridiction administrative a affirmé qu’ « est régulière la notification d’un recours en matière d’urbanisme faite à l’architecte auquel le bénéficiaire avait donné mandat, l’adresse de l’architecte étant mentionnée sur le permis litigieux comme celle à laquelle est domicilié le bénéficiaire du permis ».

Source : AJDA n°33 du 6 octobre 2014, Régularité de la notification d’un recours en matière d’urbanisme, p. 1856 

Est-il possible de retirer un permis d’aménagement illégal huit mois après sa délivrance ? 

• Question écrite n°12225 de M. J.-L. Masson, sénateur, à la Ministre du Logement et de l’Egalité des territoires 

En substance, la question posée par le sénateur était de savoir si l’article L. 424-5 du Code de l’urbanisme permet à un maire de retirer un permis d’aménager, « objet d’un recours contentieux en annulation, huit mois après qu’il ait été délivré et au motif que le recours mettrait en évidence le caractère illégal de cette autorisation d’urbanisme » ?

Afin d’éclairer l’intérêt de cette question, il convient de rappeler que l’article objet de la question prévoit la possibilité pour l’autorité compétente de retirer un permis de construire, d’aménager, ou de démolir, qu’il soit tacite ou explicite, seulement s’il remplit deux critères cumulatifs :

– Le permis doit être illégal
– Le retrait doit intervenir dans un délai de trois mois après sa délivrance

A défaut, le retrait d’une telle autorisation d’urbanisme n’est possible que sur demande du bénéficiaire du permis.

• Réponse de la Ministre du Logement et de l’Egalité des territoires 

Après avoir rappelé le principe substantiel de l’article L. 424-5, la Ministre répond négativement à la question posée par le sénateur. En effet, bien que le critère d’illégalité soit rempli, le délai de trois mois est clairement dépassé.

Source : http://www.senat.fr/questions/base/2014/qSEQ140612225.html 

La détermination du parti d’urbanisme du PLU n’appartient pas à l’Etat 

• Conseil d’Etat, 27 aout 2014, Commune d’Offemont, n°370886 

Le Conseil d’Etat est venu affirmer dans un arrêt du 27 aout 201, Commune d’Offemont, que l’Etat ne pouvait pas s’ingérer dans la détermination du parti d’urbanisme du PLU.

Dans le cas d’espèce, le Conseil municipal de la commune avait approuvé une modification du PLU, classant notamment certaines parcelles en zone N, alors qu’elles étaient auparavant placées en zone UC. A priori, dans la mesure où les réalités locales correspondent aux critères législatifs correspondant à ces zones, la détermination du parti d’urbanisme est libre. Néanmoins, le problème soulevé dans le cadre de cette affaire est que le préfet est directement intervenu afin de faire placer les parcelles en question en zone N, alors même que la révision initiale du PLU ne prévoyait pas cela.

Le propriétaire du terrain a réclamé l’annulation de la délibération du conseil municipal validant cette révision du PLU devant le Tribunal administratif de Nancy qui, dans un jugement du 13 juin 2012, a accédé à sa requête. La Commune a interjeté appel devant la Cour administrative d’appel de Nancy qui, dans un arrêt du 10 juin 2013, a confirmé le jugement.

La haute juridiction administrative estime qu’en vertu des articles L. 123-6 et suivants du Code de l’urbanisme, le Conseil municipal a méconnu sa propre compétence, et que par conséquent la délibération du Conseil municipal doit être annulée en ce qu’il s’est senti lié par les demandes du préfet.

La jurisprudence affirmée du droit de préemption face à la loi Alur 

• Cour de cassation, Civ 3ème, 17 septembre 2014, n°13-21.824 

La jurisprudence élaborée avant la loi Alur en matière de préemption est relativement claire :

1) Le juge administratif ou judiciaire applique à la préemption les règles prévues en matière de vente par l’article 1583 du Code civil qui dispose que la vente « est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur, dès qu’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas encore été livrée ni le prix payé ».

2) La rencontre des volontés qui opère le transfert de propriété est considérée par la jurisprudence comme ayant lieu « lors de la notification par le titulaire, dans le délai de deux mois qui lui est imparti, de sa décision de préempter aux prix et conditions fixées dans la DIA ».

3) Ne constitue qu’une simple offre de contracter l’offre de vente effectuée dans le cadre d’une procédure de préemption, elle peut à ce titre être unilatéralement retirée tant qu’elle n’a pas été acceptée, comme n’importe quelle offre de vente.

Dans le cas d’espèce, une promesse de vente avait été signée, faisant logiquement l’objet d’une DIA notifiée à la commune le 11 février 2004. La commune a notifié son intention de préempter le bien par le biais d’une lettre envoyée le 2 avril dont les vendeurs ont accusé réception le 3 avril. Or le 1er avril, les propriétaires envoyaient un courrier à la commune, dont celle-ci accusait réception le 3 avril, l’informant que la promesse de vente ayant engendré la production de la DIA avait été résiliée.

La solution adoptée par la Cour est d’une parfaite logique juridique : la promesse de vente engendre mécaniquement la DIA, or la DIA n’est constitutive que d‘une simple offre de vente unilatérale et comme toute offre de vente de ce type, elle peut être unilatéralement retirée tant qu’elle n’est pas acceptée, dans le cas d’espère la DIA a été acceptée le 2 avril, mais la promesse de vente a été résiliée le 1er avril, signifiant ainsi le retrait de l’offre de vente.

Source : Revue Construction et Urbanisme, Dictionnaire permanent, bulletin n°457, octobre 2014, Stopper la préemption avant qu’elle ne survienne, p. 9 

Le retrait d’un permis de construire, cause d’annulation de la vente d’un terrain pour erreur 

• Cour de cassation, troisième chambre civile, 12 juin 2014, n°13-18.446 

La troisième chambre civile de la Cour de cassation est venue moderniser la conception classique de l’erreur portant sur les qualités substantielles en matière de vente de terrains à bâtir. La Cour a en effet affirmé que le retrait d’un permis de construire portant sur un terrain vendu en tant que terrain constructible pouvait justifier l’annulation de la vente pour erreur.

En l’espèce, un terrain dont la constructibilité était attestée par un certificat d’urbanisme a été vendu en tant que terrain constructible. Or, peu de temps avant la vente, une carte des cavités souterraines a été dressée, mettant en avant la présence de cavités souterraines au niveau du terrain vendu. Le permis de construire a été octroyé sur le fondement du certificat d’urbanisme, mais a ensuite été retiré du fait de la présence de cavités souterraines. L’acheteur a ensuite réclamé l’annulation de la vente sur le fondement de l’article 1110 du Code civil, à savoir l’erreur.

La solution adoptée par la Cour de cassation illustre une évolution dans sa conception des vices du consentement, et particulièrement de l’erreur. En effet la troisième chambre civile avait adopté une solution contraire dans une affaire relativement semblable.

Dans la présente affaire, la Cour estime que « la constructibilité immédiate du terrain était un élément déterminant du consentement des acquéreurs ». Par conséquent il apparait clairement que « ce n’est pas la qualité matérielle du terrain qui compte, mais l’appréciation qu’en font les pouvoirs publics quant à sa capacité ou non de recevoir une construction ». En d’autres termes, la qualité substantielle du terrain (visée à l’article 1110 du Code civil) réside dans sa constructibilité, il s’agit d’une qualité juridique et non matérielle.
La conception de l’erreur parait être en l’espèce une fausse représentation par l’acquéreur du niveau auquel les pouvoirs publics classent le risque, or ce même risque permet d’affirmer ou non la constructibilité du terrain.

Source : Revue Construction Urbanisme n°10, octobre 2014, Le retrait d’un permis de construire peut-il être une cause d’annulation de la vente d’un terrain pour erreur ?, de P. Cornille 

CONTRATS PUBLICS 

Les accords autonomes à l’épreuve de la jurisprudence Mergui 

• Cour administrative d’appel de Bordeaux, 17 juin 2014, M. Rouveyre, n°13BX00564 

La CAA de Bordeaux, valide un accord autonome passé dans le cadre d’un partenariat public-privé conclu pour la réalisation d‘un stade. La Cour, allant à l’encontre des conclusions du rapporteur public, estime que cet accord ne méconnait pas la jurisprudence Mergui interdisant aux personnes publiques de consentir des libéralités.

Source : AJDA 2014 n°29, 8 septembre 2014, Les accords autonomes à l’épreuve de la jurisprudence Mergui, p. 1662 

Le coup d’envoi de la transposition des directives « marchés » est lancé ! 

Le décret n°2014 – 1097 du 26 septembre 2014 sonne le coup d’envoi de la transposition des nouvelles directives européennes relatives à la passation des marchés publics. Ce décret vise à mettre en œuvre des mesures destinées à faciliter l’accès aux marchés publics pour les entreprises, et plus particulièrement pour les plus modestes d’entre – elles. Ces dispositions s’appliquent à tourtes les procédures de passation de marchés ou d’accords – cadres engagés depuis le 1er octobre 2014.

Les principales nouveautés introduites par le décret sont :

1) La limitation des capacités financières pouvant être exigées des candidats par l’acheteur, ainsi la sélection d’une candidature ne peut plus être subordonnée à un chiffre d’affaires annuel supérieur au double de la valeur estimée du marché ou du lot.

2) L’introduction du principe « dites le nous une fois », qui consiste en ce que les administrés ne sont pas tenus de fournir les documents ou renseignements ayant déjà été transmis à l’autorité publique. Cependant, pour l’heure, ce principe demeure facultatif, il deviendra obligatoire au plus tard le 18 octobre 2018.

3) Le fait de dispenser les candidats de fournir les documents et renseignements que le pouvoir adjudicateur est susceptible d’obtenir par le biais d’un espace de stockage numérique ou d’un système électronique de mise à disposition d’informations administré par un organisme officiel.

4) La création d’un nouveau type de marché : le partenariat d’innovation. Son objet réside dans la recherche, le développement, l’acquisition de fournitures, services ou travaux qui soient nouveaux ou sensiblement améliorés et répondant à un besoin qui ne peut être satisfait par des offres disponibles sur le marché.

Source : Revue Construction et Urbanisme, Dictionnaire permanent, Bulletin n° 457, octobre 2014, Aménagement Travaux publics, La première salve de transposition des directives « marchés » finalement allégée, p. 8 

L’offre irrégulière écartée ne peut être constitutive d’une perte de chance 

• Conseil d’Etat, 8 octobre 2014, SIVOM de Saint-François-Longchamp Montgellafrey, n°370990 

Le Conseil d’Etat a rendu un arrêt en date du 8 octobre 2014 dans lequel il affirme que dès lors que l’offre d’un candidat irrégulièrement évincé d’une procédure de passation d‘un marché par concours était irrégulière, alors ce candidat, de ce seul fait, ne pouvait être regardé comme ayant été privé d’une chance sérieuse d’obtenir le marché, y compris lorsque l’offre retenue était tout aussi irrégulière. Il n’était par conséquent pas fondé à demander réparation d‘un tel préjudice dans la mesure où ce préjudice était inexistant.

La CAA de Lyon avait estimé que le groupement Atelier Dujol Architecture avait été privé d’une chance sérieuse de remporter un marché conclu à l’issue d’un concours par le SIVOM car son offre était irrégulière, en particulier dans la mesure où il n’avait pas pu modifier son offre, alors même que la société sélectionnée avait présentée une offre irrégulière qu’elle avait pu régulariser postérieurement. Le SIVOM a ensuite été condamné à réparer le préjudice subi par les sociétés membres de ce groupement.

Le Conseil d’Etat, saisi en cassation, rappelle quant à lui que l’offre présentée par le groupement était irrégulière, il affirme donc que de ce seul fait « ce groupement ne peut être regardé comme ayant été privé d’une chance sérieuse d’obtenir le marché ». Par conséquent, la haute juridiction administrative estime que la CAA de Lyon a commis une erreur de droit.

Compétence liée du maire pour s’opposer à des travaux déclarés alors qu’ils relèvent du permis de construire 

• Conseil d’Etat, 9 juillet 2014, n°373295, Société Orange France 

Le Conseil d’Etat est venu affirmer le fait que dans le cas où des travaux devant faire l’objet d’un permis de construire ne font l’objet que d’une déclaration préalable, alors le maire est tenu de s’opposer à cette déclaration, il s’agit d’une compétence liée.

La délivrance du récépissé n’est pas nécessaire pour faire courir les délais d’instruction d’une autorisation d’urbanisme 

• Cour de cassation, chambre criminelle, 9 septembre 2014, n°13-85.985 

La chambre criminelle de la Cour de cassation a rendu un arrêt en date du 9 septembre 2014 dans lequel elle est venue affirmer que la délivrance du récépissé dans le cadre d’une déclaration préalable n’était pas nécessaire pour faire courir les délais d’instruction d’une autorisation d’urbanisme.

Dans le cas d’espèce, le propriétaire d’un bien immobilier, souhaitant y réaliser des travaux, avait envoyé une déclaration préalable par lettre recommandée avec accusé de réception à la mairie compétente. En l’absence de réponse de la mairie, l’auteur de la lettre s’est estimé titulaire d’une décision de non opposition tacite et a de ce fait commencé les travaux envisagés.
Face à cela, le maire a avancé le fait que le formulaire utilisé lors de la déclaration préalable n’était pas le bon et que par conséquence, il n’avait par conséquent pas délivré de récépissé. Ainsi, selon lui en l’absence de récépissé, le délai d’instruction n’avait pas pu commencer à courir, et il ne pouvait donc logiquement pas y avoir d’autorisation tacite.

La Cour d’appel a suivi la thèse du maire, déclarant coupable le propriétaire construction sans déclaration préalable d’une clôture, de non respect du POS et de construction non conforme au PPRN du fait de la situation du terrain en zone inondable.

La Cour de cassation n’est pas de cet avis, elle casse l’arrêt de la Cour d’appel en consacrant globalement la thèse du propriétaire. Elle affirme en ce sens que l’administration, « saisie d’une déclaration de travaux par lettre recommandée avec accusé de réception, n’avait ni délivré de récépissé ni demandé de pièces complémentaires, telles qu’un formulaire dont elle aurait eu l’usage, avait implicitement et définitivement renoncé à s’opposer aux travaux de M. X. ». Il est donc clair que selon la Cour de cassation, la délivrance du récépissé n’est pas nécessaire pour commencer à faire courir les délais d’instruction d’une autorisation d’urbanisme.

Source : Revue Construction Urbanisme n°10, octobre 2014, La délivrance de récépissé n’est pas nécessaire pour faire courir les délais d’instruction d’une autorisation d’urbanisme, de X. Couton 

L’administration peut refuser de délivrer un permis de construire dès lors que le projet exige la modification de la consistance d’un réseau public de distribution d’eau 

• Conseil d’Etat, 11 juin 2014, Commune de Champcella, n°361074 

Le Conseil d’Etat est venu affirmer dans un arrêt en date du 11 juin 2014, Commune de Champcella que l’administration pouvait refuser de délivrer un permis de construire dès lors que le projet envisagé en son sein exigeait une modification de la consistance d’un réseau public de distribution d’eau, d’électricité, ou bien même d’assainissement qui, compte tenu de ses perspectives d’urbanisation et de développement ne correspondait pas aux besoins de la collectivité ou lorsque les travaux de modification du réseau avaient été réalisés sans son accord.

L’opposition des co-indivisaires ne peut pas fonder un refus d’autorisation d’urbanisme 

• Conseil d’Etat, 17 octobre 2014, commune de Jouars-Pontchartrain, n°360968 

Le Conseil d’Etat a estimé dans un arrêt en date du 17 octobre 2014, commune de Jouars-Pontchartrain, qu’une demande d’autorisation d’urbanisme concernant un terrain pouvait n’être déposée que par un seul co-indivisaire à la condition qu’il atteste remplir les conditions fixées par l’article R. 423-1 du Code de l’urbanisme. Ainsi, l’existence de contestations de la part d’autres co-indivisaires, excepté en cas de fraude, ne peut servir de fondement à une opposition de l’autorité compétente à la demande d’autorisation d’urbanisme.

Source : AJDA 2014, L’opposition des co-indivisaires ne peut pas fonder un refus d’autorisation d’urbanisme, de R. Grand, page 2031 

DROIT DES COLLECTIVITES TERRITORIALES 

La convention de transition, une des réponses au retrait de l’Etat en matière d’urbanisme 

L’article 134 de la loi Alur prévoit un retrait partiel mais conséquent de l’Etat dans l’instruction des autorisations d’urbanisme. Il apparait par conséquent nécessaire pour les communes de s’organiser, pour ce faire l’instruction gouvernementale du 3 septembre 2014 prévoit notamment la convention de transition.

Pour les collectivités ne pouvant plus bénéficier de l’appui des services de l’Etat, des conventions de transition peuvent être établies afin de définir les modalités d’accompagnement de l’Etat et d’aider les structures d’instruction locales à l’exercice de leur compétence en droit des sols. La signature de ces conventions n’est pas obligatoire, leur durée ne peut dépasser le 1er juillet 2016, et enfin elle ne pourra pas intervenir après le 1er juillet 2015 (sauf dans le cas où un EPCI de moins de 10 000 habitants au 1er juillet 2015 voyait sa population croitre jusqu’à plus de 10 000 habitants, dans cette hypothèse l’EPCI dispose d’un délai d’un an pour conclure une telle convention).

En substance, ces conventions permettent de prévoir la mise à disposition gratuite et temporaire d’un agent de la DDT auprès de la structure locale souffrant du retrait de l’Etat. Cependant elles ne doivent pas prévoir d’instruction par les services de l’Etat au-delà du 1er juillet 2015, en effet à partir de là ces conventions ne pourront contenir que des mesures d’accompagnement comme des formations, de l’assistance téléphonique, des fiches méthodologiques ou bien des études de cas.

Source : Revue Construction et Urbanisme, Dictionnaire permanent, bull. n°457, octobre 2014, Autorisations d’urbanisme : comment instruire quand l’Etat se retire ?, p. 5 

DROIT DE LA CONSTRUCTION

Quelques changements en matière de dossiers de demande de CEE pour la période 2015 – 2017 

Depuis 2006, des obligations d’économie d’énergie sont imposées aux fournisseurs d’énergie, elles entreront dès le 1er janvier 2015 dans leur troisième période d’application.
L’objectif de cette période est plus ambitieux quant à l’efficacité et à la sobriété énergétiques, il vise à améliorer le dispositif existant afin de simplifier le système des certificats d’économie d’énergie (CEE).

Cette recherche de simplification passe par l’harmonisation des différentes fiches d’opérations standardisées, mais également par le fait d’effectuer les demandes de CEE sans un cadre déclaratif avec le contrôle a posteriori qui en découle (à la différence du régime précédent).

Au final, un arrêté du 4 septembre 2014 prévoit les modalités de composition des dossiers de demande de CEE dans le cadre de leur troisième période.

Source : Revue Construction et Urbanisme, Dictionnaire permanent, bulletin n°457, octobre 214, Dossier de demande de CEE, version 3ème période 2015-2017, p. 7 

Un litige peut être tranché sur le fondement d’un rapport d’expertise amiable 

• Cour de cassation, chambre commerciale, 19 novembre 2013, n°12-20143, Société Tannerie Gal c. Société Limousin Chaudronnerie Industrielle et autres 

La Cour de cassation est venue préciser l’influence qu’est susceptible d’avoir un rapport d’expertise amiable dans le cadre d’un litige. Ainsi, il est possible de déduire de cet arrêt qu’un litige peut être tranché sur le fondement d’un rapport d’expertise amiable lorsque les parties ont participé aux opérations d’expertise et ont accepté de discuter entre elles.

La portée de cette décision intervient dans le cadre de la règle de principe selon laquelle le juge saisi d’un litige ne peut se fonder uniquement sur le rapport d’expertise amiable réalisée unilatéralement par les parties afin de statuer. Dans son arrêt la Cour de cassation se rattache principalement au respect du caractère contradictoire de l’expertise amiable. Dans le cas d’espèce, ce caractère contradictoire a bel et bien été respecté et mis en œuvre, ce qui fait que la Cour affirme qu’il est possible pour les juges du fond de se fonder sur un tel rapport d’expertise amiable afin de statuer, cela à la condition que le caractère contradictoire soit respecté.

A titre d’illustration, le caractère contradictoire, en l’espèce, est considéré comme étant respecté dans la mesure où les deux parties ont été convoquées aux réunions d’expertise où elles ont pu faire valoir leurs observations et déposer leurs pièces. De plus, l’expert, bien qu’ayant été choisi par une partie, a été accepté par l’autre.

Cette décision complexifie la situation des expertises amiables, en effet d’une part elle est susceptible de porter atteinte aux droits de la défense (dans le cas où une partie serait plus forte que l’autre), de plus elle impose une certaine prudence dans le cadre de ces expertises dans la mesure où elles pourront être utilisées par le juge.


DROIT DE L’ARCHITECTURE 

« L’ouverture totale du capital des sociétés d’architecture est un danger pour les architectes » 

Le Conseil de simplification des entreprises a demandé que l’ouverture du capital des sociétés d’architecture soit faite aux sociétés d’architecture européennes, ainsi la personne morale étrangère serait inscrite à l’Ordre des architectes en France. Catherine Jacquot, présidente du Conseil national de l’Ordre des architectes, estime que cela serait positif à la condition que ces personnes morales étrangères soient soumises aux mêmes conditions que les sociétés d’architecture françaises.

En revanche, est proposée dans un rapport de l’IGF la possibilité d’ouverture totale du capital des sociétés d’architecte, à toute personne physique ou morale, architecte ou non. La présidente du Conseil national de l’Ordre des architectes s’y oppose fermement. Selon C. Jacquot, il s’agirait d’un danger pour les architectes, et même plus largement, pour l’intérêt général, en effet l’architecte, en plus de son rôle de « bâtisseur » a « un rôle social fondamental », il modèle les paysages urbains et s’attache à conserver leur harmonie. Qui plus est, la mission donnée aux architectes s’inscrit dans le cadre de règles d’exercice exigeantes qui ne s’appliquent qu’aux architectes. La crainte avancée par C. Jacquot est de voir le caractère financier des projets portés par ces sociétés d’architecture au capital ouvert l’emporter sur toute autre considération, notamment d’intérêt public.

Il faut néanmoins souligner l’impact relativement restreint sur la profession d’une telle mesure puisqu’elle ne viserait que les sociétés d’exercice libéral, soit 4% de la profession. Ce qui inquiète dans le cadre de cette mesure n’est pas son ampleur mais ses potentiels élargissements.

Cette mesure s’intègre dans le mouvement de recherche de libéralisation générale des professions règlementées soutenue par le ministre de l’économie, Emmanuel Macron. Il faut également faire le rapprochement entre ces sociétés à capitaux ouverts et les modèles anglo-saxons de sociétés d’architecte qui s’appuient principalement sur un critère financier.

Source : lemoniteur.fr, « l’ouverture total au capital des sociétés d’architecture est un danger pour les architectes » Catherine Jacquot, présidente de l’Ordre, paru le 16 octobre 2014