ACTUALITÉS JURISPRUDENTIELLES, DOCTRINALES, LÉGALES & RÉGLEMENTAIRES

ARCHITECTURE – MAITRISE D’ŒUVRE

Février 2012
(Michel HUET avec la collaboration de Rebecca HOZÉ)

– MARCHÉS PUBLICS :

• Conseil d’Etat 23 Décembre 2011 req n°350231

Une entreprise demande en référé et obtient l’annulation de la procédure par laquelle elle avait été retenue pour l’attribution de neuf lots d’un marché portant sur des prestations de transports scolaires non urbains sur l’ensemble du territoire de la Guadeloupe. La société se plaint d’avoir été attribué de seulement 9 lots sur 153 et donc de ne pas pouvoir dégager une rentabilité suffisante.

Le conseil d’Etat ne retient pas cet argument car le principe de l’allotissement implique que les candidats ne savent jamais à l’avance pour combien de lots ils seront retenus. Le Conseil d’Etat précise le régime de l’intérêt à agir dans le cadre du référé précontractuel : une entreprise attributaire n’a pas d’intérêt à agir à l’encontre de la procédure de passation. Celle-ci peut toujours retirer son offre avant la conclusion du contrat.

La solution du Conseil d’Etat va dans le sens de l’arrêt « Smirgeomes » : le juge des référés précontractuels doit rechercher si l’entreprise évincée subit la perte d’une chance sérieuse de remporter le marché si la collectivité avait respecté les règles de publicité et de mise en concurrence. Or, ici l’entreprise est attributaire.

Marchés publics : se prémunir des candidats mal lotis par Jean Marc Joannès, La Gazette 23 Janvier 2012.


• TA Paris 6 janvier 2012, Préfet de paris c/Société Sempariseine et Ville de Paris, req. n°1111213

Le TA a annulé sur déféré préfectoral, le 3e avenant au marché de maitrise d’œuvre conclu pour l’aménagement du quartier des Halles, considérant qu’il bouleversait l’économie du contrat initial.

L’avenant litigieux conclu en janvier 2011 en raison d’une augmentation du cout prévisionnel des travaux, a fixé la rémunération du maitre d’œuvre à plus de 25 millions d’euros, correspondant à une augmentation de 28.48% de la rémunération initiale. Le préfet a alors déféré ce 3e avenant au juge. Le tribunal estime que « compte tenu de l’identité d’objet entre le marché initial et les prestations complémentaires couvertes par l’avenant et du caractère prévisible des dépassements constatés sur le marché de travaux, cette augmentation de prix doit être regardée comme ayant bouleversé l’économie générale du contrat… ». L’annulation avec effet rétroactif de l’avenant n°3 ne prendra effet qu’à compter du 31 Mai 2012.

Annulation d’un avenant au marché de maitrise d’œuvre du chantier des Halles, AJDA 30 Janvier 2012.


• CAA Lyon 6 Octobre 2011, n°10LY01121 SNESO

Le département du Puy de Dome passe deux marchés globaux pour la réhabilitation de deux collèges. Il y a selon la cour, une contrainte dont l’instruction n’établit pas qu’elle aurait été incompatible avec le recours à l’allotissement . De plus, le maitre de l’ouvrage ne peut se prévaloir de la faiblesse des effectifs de ses propres services pour soutenir qu’il ne disposait pas de la capacité d’assurer la programmation et la coordination des travaux, dès lors qu’il avait recruté un maitre d’œuvre dont la mission portaient sur l’élaboration, puis le suivi du planning de chantier.

Allotissement : illégalité de marchés globaux passés pour la rénovation de collèges, Revue Jurisclasseur Contrats et Marchés Publics N°12, Décembre 2011


-Sur ce même arrêt :

Le syndicat national des entreprises du second œuvre est recevable à agir contre les décisions du président du conseil général de signer des marchés globaux en vue de la rénovation de deux collèges. Cette solution est analogue à celle du Conseil d’Etat du 28 Décembre 2011 selon laquelle un ordre régional des architectes est recevable à demander l’annulation de décisions relatives à la passation d’un marché de conception-réalisation. En effet, le recours à un tel contrat est de nature à affecter les droits conférés aux architectes par la loi du 3 Janvier 1977.

Intérêt à agir d’un syndicat contre la décision de signer un marché global, Revue Jurisclasseur Contrats et Marchés publics N°12, Décembre 2011


•Rappels utiles relatif à l’information des candidats évincés

En application de l’article 80 du Code des marchés publics, pour les procédures formalisées dans lesquelles ont été obtenues plusieurs offres, le pouvoir adjudicateur dès qu’il a fait son choix, notifie à tous les autres candidats le rejet de leur candidature. La notification précise les motifs de rejet, le nom de l’attributaire et les motifs qui ont conduit au choix de cette offre. Il s’agit d’une formalité substantielle, pouvant entrainer l’annulation de la procédure par le juge administratif. Le « recours Tropic » issu d’une jurisprudence du Conseil d’Etat du 16 Juillet 2007, permet un recours en plein contentieux dans le délai de deux mois après publication d’un avis d’attribution.

Selon la Cour administrative d’appel de Bordeaux, l’information du candidat évincé, obligatoire en procédure formalisée, s’applique également en marché à procédure adaptée. Cependant un arrêt opposé du Conseil d’Etat du 19 Janvier 2011 se fondant sur l’article 20 du CMP, a confirmé l’absence d’obligation pour l’acheteur public d’informer les candidats évincés en marché à procédure adaptée.

Dans un arrêt du 2 Aout 2011, le CE rappelle que l’article 80 du CMP prévoit un délai minimum de seize jours durant lesquels les candidats non retenus peuvent former un recours précontractuel.

Réponse ministérielle n°18901, Revue Jurisclasseur Contrats et Marchés publics N°12, Décembre 2011


• CJUE 10 Novembre 2011, aff.C-348/10, Norma-A SIA, Dekom SIA c/ Latgales planosanas regions.

La CJUE avait été saisie de plusieurs questions préjudicielles par une juridiction lettone dans le cadre d’un litige d’une « concession » de services de transport en commun. La question principale était relative aux définitions du « marché de services » et de la « concession de services ». Constitue un marché de services au sens de l’article 1er de la directive 2004/17, un contrat par lequel un contractant, en vertu des règles de droit public et des clauses contractuelles qui régissent la fourniture de ces services, n’assume pas une part significative du risque que le pouvoir adjudicateur encourt.

La Cour a jugé que le risque très limité du fait de l’intervention des règles de droit public applicables au secteur d’activité en cause ne fait pas obstacle à la possibilité de transférer une part significative de ce risque et donc que ce contrat soit qualifié de concession.

La Cour rappelle que la qualification concrète de l’opération appartient au juge national. Pour que ce soit un marché public de services, il faut s’assurer que le prestataire n’encourt pas un risque d’exploitation même très limité qui consiste en un risque d’exposition aux aléas du marché pouvant se traduire par le risque de concurrence de la part d’autres opérateurs…

Critère du risque économique et définition du marché public de services, Revue Jurisclasseur Contrats et marchés publics N°1, Janvier 2012


• La négociation d’un marché à procédure adaptée : libertés et contraintes

Il est conféré au pouvoir adjudicateur la faculté de négocier dans le cadre d’une procédure adaptée. La décision de ne pas négocier n’appelle aucune justification et sous les réserves liées au respect des principes de transparence des procédures et d’égalité de traitement des candidats, il n’existe pas de droit à la négociation dans les MAPA.

La personne publique doit cependant informer les candidats de sa décision dès le début de la procédure. La décision est définitive : une négociation organisée sans information préalable sera irrégulière. L’arrêt Ministre de la Défense et des Anciens combattants prononcé du Conseil d’Etat prévoit que dans le respect du principe d’égalité de traitement, le pouvoir adjudicateur peut décider d’admettre à la négociation les candidats ayant remis des offres inappropriées, irrégulières ou inacceptables sans les éliminer d’emblée.

L’acheteur public devra rejeter à l’issue de la négociation les offres « demeurées » dans leur premier état.L’élimination prévue par l’article 53 III du CMP n’interviendra qu’à défaut de régularisation de l’offre au cours de la négociation. Par ailleurs que le pouvoir adjudicateur n’est pas tenu d’engager des négociations avec tous les candidats ayant remis une offre.

En 2010, il a été jugé que la sélection des candidats admis à négocier n’était légale que si le pouvoir adjudicateur avait indiqué clairement ses critères de sélection.

D’autre part, il est admis que la négociation ne peut servir de prétexte à la modification des caractéristiques principales du marché. La modification du règlement de consultation est envisageable qu’à condition que le pouvoir adjudicateur puisse en justifier l’intérêt et invite l’ensemble des candidats en cours de négociation à déposer une nouvelle offre modifiée.

Revue Jurisclasseur Contrats et marchés publics N°1, Janvier 2012.

– DROIT DE L’ENVIRONNEMENT :


• Conseil d’Etat 14 Octobre 2011, « Société Ocreal » n°323257

Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d’une étude d’impact sont susceptibles d’entraîner l’illégalité de l’arrêté d’autorisation d’une installation classée. En l’espèce, il s’agissait d’incinération de déchets ménagers et assimilés.

Le Moniteur 6 janvier 2012, N° 5641


• Conseil d’Etat 14 Octobre 2011, « SARL Vue sur Cour » n°336080

Aucun texte n’impose l’installation de panneaux solaires ni une certification haute qualité environnementale (HQE) pour les centres commerciaux. Le projet d’ensemble commercial répond au critère de développement durable selon le juge, lors sont pris en compte : le traitement des eaux pluviales, la gestion des déchets, la pollution et la maitrise de consommation énergétiques.

Le Moniteur 6 janvier 2012, N° 5641


• Cour d’Appel de Versailles 22 septembre 2011, « SARL Segvama c/ SA Aventis Pharm » n°10/08199

L’ayant droit du dernier exploitant peut se voir imposer de remettre le site en état au titre de la législation sur les ICPE. Cette obligation de remise en état est soumise à prescription trentenaire à partir de la date de notification de la cessation d’activité à l’administration. En l’espèce, l’action était prescrite.

Le Moniteur 6 janvier 2012, N° 5641


• Cour d’Appel d’Orléans, 12 Septembre 2011, « SCI de Champatay », n°10/0156699

L’absence totale d’entretien d’un site permet de qualifier le matériel entreposé de « déchet ». L’Agence de l’environnement et de la maitrise de l’énergie (Ademe) peut donc procéder aux travaux d’évacuation sur le site laissé à l’abandon. Elle est fondée à recouvrer les sommes engagées auprès du propriétaire du site qui doit se voir reconnaitre la qualité de détenteur des déchets dès lors qu’il dispose de la maitrise totale du site.

Le Moniteur 6 janvier 2012, N° 5641


• Les sites protégés, inscrits ou classés : une protection renforcée du Conseil d’Etat

Les sites protégés, inscrits ou classés ont pour objectif la préservation d’espaces naturels ou bâtis présentant un intérêt certain au regard des critères prévus par la loi. Le conseil d’Etat rappelle régulièrement qu’un permis de construire ne doit pas porter atteinte au caractère de ces sites. Dans les sites classés non constructibles, seuls des aménagements s’intégrant harmonieusement au site peuvent être autorisés.

La qualité d’espace « remarquable » se déduit de son régime juridique et de sa nature propre. S’il existe une présomption pour les zones naturelles faisant l’objet d’un classement, le juge administratif manifeste le souci de caractériser en espace remarquable les zones présentant un intérêt écologique majeur au maintien des équilibres biologiques. Le juge n’hésite pas à censurer les documents locaux d’urbanisme qui ne respectent pas la préservation des espaces remarquables (L146-6 du code de l’urbanisme)

Le Conseil d’Etat peut enjoindre la démolition d’un ouvrage public irrégulièrement construit dans un espace remarquable. Il fait application de la théorie du bilan : il examine si la démolition de l’ouvrage ne porte pas une atteinte excessive à l’intérêt général, eu égard à l’intérêt public qui s’attache, d’une part, à la préservation d’un espace naturel remarquable et fragile et, d’autre part, au maintien de sa biodiversité. Les zones littorales et de montagnes sont particulièrement concernées.

Les sites protégés sous l’aile du Conseil d’Etat, Le Moniteur 6 Janvier 2012, N°5641


• Conseil d’Etat 9 décembre 2011, n°341274

Les zones NC constituent aux termes de l’ancien article R.123-18 du code de l’urbanisme, des zones de richesses naturelles à protéger en raison notamment de la valeur agricole des terres ou de la richesse du sol ou du sous-sol. D’autres critères peuvent être pris en compte pour ce classement dans une zone NC comme les considérations de protection des risques de feux de foret.

Le Conseil d’Etat valide la création au sein de la zone NC d’un secteur NCe à vocation d’énergie éolienne où peuvent être construits des ouvrages de production d’énergie éolienne. Il écarte l’application des dispositions du règlement du POS « manifestement incompatibles » avec l’implantation des éoliennes dans un secteur qui leur est dédié. Le Conseil d’Etat écarte ainsi la règle de hauteur des constructions limitées à 8m50. En revanche, on ne peut écarter l’application des règles de prospect au secteur NCe, n’étant pas manifestement incompatibles avec l’implantation des éoliennes.

Un parc éolien en zone NC du POS, c’est possible ! Revue Construction et urbanisme Janvier 2012.

– DROIT DE L’ARCHITECTURE :

• Le contentieux des arbres dans une copropriété

Les arbres sont susceptibles de créer des troubles de voisinage causés par une perte de vue et de luminosité des appartements soit par une atteinte à l’agrément dont bénéficient les parties privatives lorsque des arbres sont dégradés ou détruits lors d’aménagements entrepris dans la copropriété.

C’est le syndicat des copropriétaires qui assume la garde si les arbres sont implantés dans les parties communes. Il est responsable selon l’article 14 de la loi de 1965 des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers, s’il y a eu défaut d’entretien consistant en l’abattage ou l’élagage. En cas d’abattage, le syndic ne peut intervenir que sur décision de l’assemblée générale sauf s’il y a urgence.

Si les arbres sont situés dans les parties privatives, c’est le copropriétaire qui est tenu de veiller à l’entretien normal de ces arbres et le syndicat conserve un droit de regard et d’intervention. Si le règlement de copropriété fixe des modalités d’entretien des arbres existant sur les parties communes objets de droit de jouissance exclusive, il appartient au syndicat de vérifier le respect de ces clauses par les copropriétaires. Il pourra en effet procéder d’office à l’élagage s’il y a troubles de jouissance. L’action intentée en référé par le syndicat de copropriété contre un copropriétaire pour violation du règlement de copropriété, ne relève pas de la compétence du juge des référés. Il ne peut pas dire si le plan local d’urbanisme prévaut sur la loi de 1965 et sur le règlement de copropriété.

Lorsqu’une partie commune est grevée d’un droit de jouissance exclusive, la jurisprudence admet un partage des frais d’entretien entre le syndicat et le bénéficiaire du droit. Les distances prévues par l’article 671 du code civil et les règles de voisinage demeurent applicables lorsqu’il s’agit d’arbres plantés sur une propriété voisine, susceptibles de créer des troubles de voisinage dans une copropriété contigüe.

Le vert sied à la copropriété, par Guy Vigneron, Revue Jurisclasseur Loyers et copropriété Janvier 2012.


• CAA Marseille 21 Octobre 2011, Service départemental d’incendie et de secours de l’Hérault, req.n°09MA00782

La stipulation pour autrui prévue à l’article 1121 du code civil, consiste à ce que le promettant souscrit un engagement envers son cocontractant, le stipulant-, au profit d’un tiers au contrat, le bénéficiaire.

La direction départementale des services d’incendie et de secours de l’Hérault et la fédération française de spéléologie représentée par le comité départemental de spéléologie de l’Hérault ont conclu une convention d’assistance technique en spéléo-secours. En exécution de cet accord, une opération de sauvetage a eu lieu.
La demande de remboursement des frais ayant été rejetée, la FFS a saisi le SDIS d’une réclamation avant d’engager un recours contentieux. La cour donne satisfaction à la FFS
comme le TA admettant la recevabilité à agir de la FFS mais en s’appuyant sur le mécanisme de la stipulation pour autrui et non en qualité de mandataire.
La DDSDIS s’est engagée à procéder à l’indemnisation des participants à l’opération de secours, licenciés de la FFS. La direction a alors souscrit une promesse en faveur de tiers s’adossant à la convention d’assistance technique conclue à titre principal.

Le recours exercé par le bénéficiaire d’une stipulation pour autrui est recevable car la stipulation confère au bénéficiaire un droit de créance qui nait dès la conclusion du contrat. La FFS était donc recevable à agir pour obtenir du juge l’exécution de la stipulation souscrite par la DDSDIS de l’Hérault au profit de ses salariés. La demande en paiement présentée par chaque adhérent de la FFS au SDIS de l’Hérault avant l’expiration du délai de 4 ans (prescription de la loi du 31 Décembre 1968), avait interrompu le cours de la prescription, alors même que l’action était engagée par le stipulant. La demande de règlement des frais découlait en effet du droit de créance né à leur profit, dont pouvait également se prévaloir le stipulant. La cour a donc condamné la SDIS à verser à la FFS le montant des frais exposés par ses adhérents lors de l’opération de sauvetage à charge pour la fédération de reverser les indemnités à ces derniers.

La stipulation pour autrui en droit administratif, par Micheline Lopa Dufrenot, AJDA Janvier 2012.


• Les AVAP, mode d’emploi

Le décret d’application des aires de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine (AVAP) remplaçant les ZPPAUP est désormais paru. Celui-ci détaille le régime des autorisations spéciales de travaux censé s’appliquer dans les futures AVAP mais aussi depuis le 1er Octobre 2011, dans les ZPPAUP existantes. Les travaux réalisés dans le périmètre d’une AVAP sont soumis à autorisation préalable délivrée par le maire, le président d’intercommunalité ou bien le préfet.

Lorsque ces travaux sont assujettis à autorisation au titre du code de l’urbanisme, celle-ci tient lieu de l’autorisation spéciale AVAP, dès lors que la décision a fait l’objet d’un accord de l’ABF, du préfet de région ou du ministre chargé des monuments historique et des espaces protégés. Eléments de procédure : article D.642-21 et suivants du Code du patrimoine.

Le décret accélère considérablement les procédures mais aussi concrétise un nouvel équilibre entre les élus locaux et l’ABF au sein de ces AVAP via une procédure de recours remaniée.

D. n° 2011-1903, 19 Décembre 2011 : JO, 21 décembre.


• Décret N°2011-1903 du 19 Décembre 2011

Le décret remplace les ZPPAUP par les AVAP (aires de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine). Il définit le contenu et la procédure d’établissement d’une AVAP et précise les modalités de délivrance d’une autorisation de travaux dans cette aire. Il instaure une sanction pénale en cas de violation des dispositions relatives à l’autorisation de travaux. Le décret aménage également le régime des recours contre l’avis des ABF et supprime les régimes d’évocation ministérielle associés au champ de visibilité des monuments historiques et aux secteurs sauvegardés.

– la décision de mettre à l’étude un projet d’AVAP est prise sur délibérations concordantes du ou des conseils municipaux de la ou des communes concernées ou sur délibération de l’organe délibérant de l’EPCI compétent en matière de PLU.

Création d’une aire :
– Le projet de création ou de révision d’une AVAP est à l’issue de cette étude, soumis aux délibérations concordantes du ou des conseils municipaux de la ou les communes concernées, ou à la délibération de l’organe délibérant de l’EPCI.
– Le projet comporte un rapport de présentation des objectifs de l’aire, auquel est annexé un diagnostique, le règlement et le document graphique
– Le silence gardé pendant deux mois par les personnes publiques consultées pour examen du projet de création ou de révision d’une aire, vaut avis favorable.
– Le projet de création est soumis à l’accord du préfet à l’issue de l’enquête publique

Régime des travaux dans une aire :
– l’autorisation d’urbanisme (Permis de construire, permis d’aménager…) tient lieu de l’autorisation prévue à l’article L642-6 dès lors que la décision a fait l’objet de l’accord, selon les cas prévus par cet article, de l’architecte des Bâtiments de France, du préfet de région ou du ministre chargé des monuments historiques et des espaces protégés.
– Le dossier joint à la demande d’autorisation comprend un plan permettant de connaitre la situation du terrain à l’intérieur de la commune et une notice indiquant les matériaux utilisés et les modes d’exécution des travaux.
– Dans les quinze jours qui suivent le dépôt de la demande et pendant la durée d’instruction de celle-ci, le maire procède à l’affichage en mairie d’un avis de dépôt de demande d’autorisation précisant les caractéristiques essentielles du projet
– Lorsque le dossier de la demande d’autorisation est complet, le silence gardé pendant plus de deux mois par l’autorité compétence vaut décision de rejet
– L’ABF dispose d’un délai d’un mois à compter de sa saisine pour faire connaitre son avis à l’autorité compétente. A défaut, il est réputé avoir émis un avis favorable.
– Toute décision expresse prise par l’autorité compétente comportant refus, prescription ou adaptation mineure, est motivée.
– Mention de l’autorisation doit être affichée sur le terrain dès la notification de l’arrêté ou dès la date à laquelle l’autorisation est acquise, et pendant toute la durée du chantier.
– L’autorisation est périmée si les travaux ne sont pas entrepris dans le délai de deux ans à compter de la notification de la décision

Sanctions pénales: Réaliser des travaux dans une AVAP sans l’autorisation préalable est punie de l’amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe.

– DROIT DE L’AMÉNAGEMENT URBAIN :

• Décret du 29 Décembre 2011 portant réforme des études d’impact des projets de travaux, d’ouvrages ou d’aménagement

Le décret fait évoluer le contenu de l’étude d’impact en le consacrant non plus comme util utilisé en amont d’un projet mais aussi comme outil de suivi de projet. Conformément à la loi Grenelle II, le décret dresse des listes positives de cas dans lesquels les projets de travaux et d’aménagements publics ou privés feront l’objet d’une étude d’impact. 3 catégories sont soumises à l’étude d’impact :

– les projets qui en raison de nature sont toujours soumis à une étude d’impact (installations nucléaires…)
– les projets qui dépassent un certain seuil
– les projets soumis au cas par cas

Quand bien même un projet ne se trouve pas en deçà des seuls obligatoires, l’autorité administrative peut imposer au maitre d’ouvrage ou au pétitionnaire d’effectuer une étude d’impact.

Elle s’appuie pour cela sur les informations fournies dans un formulaire de demande d’examen présentant notamment une description des caractéristiques principales du projet. Elle doit informer par décision motivée s’il faut une étude d’impact ou non dans le délai de trente jours à compter de la réception du formulaire complet. Le défaut de réponse équivaut à obligation d’étude d’impact. Le contenu de l’étude d’impact est précisé à l’article R122-4 du code de l’Environnement.

Ainsi, le maitre d’ouvrage doit indiquer une description du projet, l’étude de ses effets sur la santé, les mesures envisagées pour éviter, réduire ou compenser les conséquences dommageables sur l’environnement et la santé.

Le décret prévoit le cadrage préalable ayant pour but de préciser le contenu de l’étude d’impact avant de la joindre à la demande d’autorisation. Le maitre d’ouvrage peut saisir l’autorité administrative pour avis. L’étude doit en outre indiquer une esquisse des principales solutions de substitution. Le pétitionnaire doit donc envisager son projet sous différentes perspectives environnementales et doit effectuer des études approfondies pour chacun des projets de substitution. Un régime spécial est prévu pour les infrastructures de transport avec une analyse spécifique.

Enfin, le décret vient renforcer l’information du public aussi bien en amont de la décision qu’en aval de la décision.

Par Christian Huglo, Gazette du Palais Janvier 2012 N°18 à 19

– DROIT DE L’URBANISME :

• Conseil d’Etat 30 Décembre 2010, req n°324310

Un particulier conteste le refus de permis de construire d’immeubles dont le terrain d’implantation se trouve en zone rouge du PPRI (plans de prévention des risques d’inondation) de la Seine dans les Hauts de Seine. Selon le requérant, le terrain n’est pas submersible. Le Conseil d’Etat rappelle que les PPRI ont pour effet de déterminer des prévisions et règles opposables aux personnes publiques ou privées, au titre de la délivrance des autorisations d’urbanisme. Rien ne s’oppose à ce qu’une même zone d’un PPRI regroupe des secteurs correspondant à une zone de danger, mais aussi d’autres secteurs correspondant à « une zone de précaution ». C’est donc une lecture extensive des effets du classement d’un terrain en PPRI en incluant des zones de précaution.

Risques d’inondation : de la prévention à la précaution, JM Joannès, La Gazette 30 Janvier 2012.


• 20 questions sur le caractère définitif d’un permis de construire

Trois points doivent être vérifiés pour s’assurer du caractère définitif d’un permis :
– le recours des tiers
– le retrait du permis par son auteur, pour illégalité qui peut être de forme et/ou de fond
– le recours exercé par le préfet contre le permis dans le cadre de son contrôle de légalité

Un permis de construire pourra être considéré comme définitif si aucun recours ou retrait n’est intervenu et n’a été notifié dans les délais prévus à ces effets. L’affichage doit être assuré en mairie et sur le terrain. C’est presque au cas par cas que le juge apprécie la validité de l’affichage du permis en s’assurant que les tiers susceptibles d’avoir un intérêt à introduire un recours bénéficie des informations utiles.
Il appartient au bénéficiaire du permis qui entend opposer la forclusion au requérant de faire la preuve de l’expiration du délai de recours donc celle d’un affichage préalable à l’introduction du recours pendant une période supérieure à celle de ce délai (preuve par photographies, constats d’huissier). S’ajoute à cela la transmission au préfet pour contrôle de légalité. Les tiers peuvent attaquer le permis de construire dans le cadre d’un REP dans le délai de deux mois à compter du premier jour d’une période continue de deux mois d’affichage sur le terrain. A défaut d’un affichage régulier, le délai peut courir jusqu’à un an après l’achèvement de la construction. Pour être recevable, le recours doit être motivé. Il est également possible de faire un recours gracieux ou un recours hiérarchique. Une demande d’aide juridictionnelle adressée au bureau compétent dans le délai du recours contentieux, interrompt le délai.

Le retrait d’un permis doit intervenir dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision. Passé ce délai, le permis ne peut être retiré que sur demande explicite de son bénéficiaire. L’administration peut cependant retirer sans condition de délai un permis obtenu par fraude. La jurisprudence affirme de plus, l’autonomie du délai de retrait et du délai du déféré préfectoral. Lorsque le préfet défère un permis, son objectif est de s’opposer à la construction qu’il juge illégale. Or, le bénéficiaire du permis peut le mettre en œuvre entre temps et c’est pour cela que si le juge administratif a annulé par une décision devenue définitive le permis de construire, le préfet dispose d’une action civile en vue la démolition des constructions.
Néanmoins, à peine d’irrecevabilité, l’auteur de la décision attaquée et son bénéficiaire doivent être informés de tout recours contentieux.

En cas de recours devant la juridiction administrative ou civile contre un permis, le délai de validité est suspendu jusqu’au prononcé d’une décision juridictionnelle irrévocable. Le bénéficiaire du permis peut attendre l’issue du recours sans que celui-ci n’entraine quasi automatiquement sa caducité.

Dans quelles conditions un voisin peut il agir en démolition ? L’article L480-13 du code de l’urbanisme organise une action délictuelle en démolition contre le propriétaire devant être engagée dans les deux ans de la décision définitive d’annulation du permis par le juge administratif. Une action en démolition peut aussi être engagée pour un motif de droit privé car le permis de construire est toujours délivré sous réserve du droit des tiers.

Le voisin peut agir en dommages et intérêts contre le constructeur en réparation du préjudice allégué du fait de l’illégalité du permis. L’action se prescrit par deux ans à compter de l’achèvement des travaux.

Documents à se procurer pour apprécier le caractère définitif du permis :
– copie des constats d’huissier pour l’affichage
– attestation sur l’honneur du bénéficiaire du permis certifiant qu’il n’a reçu aucune notification de recours gracieux ou contentieux (une autre à ajouter pour ceux émanant du préfet)
– attestation sur l’honneur du bénéficiaire du permis certifiant qu’il n’a reçu aucune demande d’observation de l’administration en vue d’un éventuel retrait
– Lettre de notification du permis au bénéficiaire mentionnant la date de transmission au préfet pour son contrôle de légalité


• Conseil d’Etat 11 Mai 2011, n°331153 Société Lyonnaise des Eaux de France

Un justiciable qui souhaite contester une mesure prise à la suite d’une annulation qu’il a obtenue ne justifie pas, en cette seule qualité, d’un intérêt à agir. N’est donc pas regardée comme automatiquement recevable, l’action d’un particulier ou d’une association demandant l’annulation d’un acte détachable d’une transaction signée pour tirer les conséquences de la résolution d’une délégation de service public prononcée en exécution d’un jugement dont ils ont bénéficié.

L’arrêt réaffirme l’exigence selon laquelle la recevabilité des tiers à contester l’acte détachable d’un contrat est subordonnée à la condition que les stipulations du contrat en cause soient de nature à les léser dans leurs intérêts de façon suffisamment directe et certaine. Appliquée au cas d’espèce, cette exigence signifie que la qualité d’usager du service public de l’eau ne confère pas à elle seule, un intérêt à agir contre l’acte détachable d’un contrat ayant un rapport quelconque avec ce service.

Le CE rappelle que l’intérêt direct et certain des usagers à former un REP contre un acte en lien avec le service public ne se conçoit que dans deux hypothèses : soit lorsque cet acte affecte l’organisation ou le fonctionnement dudit service, soit quand il a pour effet d’augmenter les redevances demandées aux usagers.

D’autre part, le troisième considérant de l’arrêt relève que les requérants se sont prévalus de leur « seule qualité » d’usager du service. On pourrait alors considérer que la situation aurait été différente s’ils avaient revendiqué celle de contribuable local. En effet, un contribuable a un droit de regard sur un acte lorsque celui implique un alourdissement de la pression fiscale.

Revue juridique de l’économie publique Janvier 2012